Sa main serra la mienne un peu plus fort.
Sa main serra la mienne un peu plus fort. J’écartais les branches devant moi, tout en tentant tant bien que mal de ne pas trébucher. Je n’osais pas croiser son regard. J’étais à bout de souffle, et sans doute qu’elle aussi. Pourtant sa main dans la mienne ne tentait pas de s’échapper. Je l’avais entraîné dehors et puis à travers le bois sans m’expliquer. Quand je m’arrêtai enfin, plutôt que de lâcher ma main, elle la serra, un peu plus fort encore, me fit face et souri. Pan.
Sa main serra la mienne un peu plus fort. J’étais par terre, et ses larmes coulaient en baume sur ma plaie ouverte. “J’ai échoué,” pensais-je. Un second coup de feu éclata, suivis de deux autres. Elle s’abrita entre ses deux mains, sans lâcher la mienne. Je ne pouvais plus bouger. Mon visage aussi était humide. Je ne pouvais plus rien pour elle, j’étais paralysé. Pas même la force de lui sourire, jusqu’à ce qu’inévitablement, mon corps m’abandonne et …
Sa main serra la mienne un peu plus fort. “L’ambulance arrive, ne bouge pas,” me dit elle, trois fois. J’avais comme seul paysage une vision floue d’un ciel vide et orange de pollution, avec entre lui et moi, le visage d’une fille en sanglot qui n’avait pas sa place à mes coté. Je l’avais prise en stop. Elle devait avoir dix-huit ans à peine. Elle devrait être devant un bon bouquin ou en train de réviser, pas plantée là devant un chasseur de prime soufflant sa vieille âme.