6 lignes – Jour 72

loup-venant:

amorcepour6lignes:

Nous étions nus.

Nous étions nus. Loin des prairies fleuries et cieux aux nuages orangés. Ni mains dans les cheveux, ni baisers langoureux. Nous n’avions pas même un arbre duquel profiter de l’ombre. Le soleil abondant avait repeint la vitrine de nos corps, perdus sur le sable rond du désert. Le teint légèrement halé des fesses de Charline
tirant vers l’or
me faisait reprendre conscience, plus que ce charmant panorama, à quel point ma peau était intolérante au soleil de midi.

Nous étions nus. Comment oublier ? Nous étions parti pour l’autre bout du monde. Chacun seul, chacun de son bout de nulle part, pour la grande aventure. Nous avions pris l’avion, depuis une grande ville, où tout est klaxon, ou rien n’est tranquille. Nous étions arrivé en différé, et malgré nos différences, nous avions atterrit dans le même bar, avec le même guide qui nous montra les même dunes. Ce brigand nous y laissa, en prenant nos fringues et nos tunes.

J’ai reçu des nouvelles de Charline. Loin du sable rond du désert, son panorama, cette fois aux couleurs de l’hiver, baigne dans un lac gelé d’un autre bout du monde. Je souris en repensant à notre aventure dans le désert et devant son sourire sur cette photo. Il semble m’être destiné. La photo est datée du quatre Août. Mon téléphone vibre sur la table et quelqu’un frappe à la porte. Je regarde l’écran. L’icône d’un message s’est installée en haut à gauche après celle de mon alarme. Mon cœur fait un bon. Je l’ouvre.

“Votre changement d’opérateur est en cours. Bienvenue chez …”

Et si ?

La maison est vide et sens l’humidité. La pluie balaie les tuiles sans répit depuis que la nuit est tombée. Sur son lit, Armelo se dégourdit les doigts sur une guitare dont il dompte les cordes au rythme de ses découvertes. Il connaît bien quelques accords, mais pour le reste, il avance à l’oreille.

Sa tête est prise et jouer de cet instrument l’aide à la vider. Ou du moins la calmer pendant un temps. Il ne cesse que quand ses doigts usés n’ont plus la force de caresser les cordes.
Alors il reprends conscience du lieu. La maison est vide et sens l’humidité. Son visage lui fait mal. En haut du nez et autour des tempes et en bas dans le ventre. Ses oreilles sifflent. Il digère sa vie petit à petit et il y a du travaille.

Il dépose la guitare. Même si la fatigue l’exhorte de s’arrêter, de se reposer, son esprit, lui, vagabonde, de scène en scène et de pièce en pièce.
“Et si, et si, et si…” Sans arrêt ni répit. Il a les pieds dans l’eau au bord de d’une plage, et chaque pensée le frappe comme les vagues qui vont et viennent l’emportant toujours plus loin vers les rochers tranchant de la falaise la plus proche. Il sait qu’il ne peut gagner contre l’océan et cette impuissance le révolte. Il aimerait pouvoir être comme la plage qui accueille la vague, quelle qu’elle soit. Haute, profonde, rapide ou lente mais pour l’instant il a plus de point commun avec les rochers tranchants qui contre la falaise se font façonner par l’océan sans pouvoir choisir leur forme.

Il est temps de se changer les idées. Alors, il sort au marché. Un lieu de vie pour retrouver la sienne.
Mais tout va vite, tout est fouillis, tout est grouillant.
D’un coté les passants qui ne lui prête aucune attention. D’un autre ceux qui montent la garde, il n’est pas question de perdre sa place dans la file. Et en face, les marchands qui vendent tout ce qu’il est possible d’entendre.
Son ventre se sert, ses épaules se crispent, son corps se recroqueville sur lui même. “Venez chercher vos pommerocs tout droit descendues de Talenbrume !” Il faut qu’il s’échappe, vite, avant de se pétrifier.
Ses jambes sont lourdes. Un pas après l’autre, péniblement, il avance.
“Ils sont pas beaux mes miellés de Val Tereigne ?”
Armelo ferme les yeux “Il a pas l’air bien” heurte des corps “Regarde où tu marches !” trébuche et tombe “Cinq pièces, vous êtes fou ?” Son cœur est attrapé par un corps inconnu. Le sien ne répond plus. Il est entraîné malgré lui.

Quand il ouvre enfin les yeux. Il est sur la falaise, face à l’océan, seul.
L’horizon à bordé le soleil, la nuit va tomber à nouveau. Il est temps de rentrer. De dormir.
Il sait que la bataille sera longue.

S’il arrive à s’endormir alors il rêve. Il rêve d’être loin, parfois seul, parfois accompagné. Ça fini toujours mal. On le chasse, on le poursuit. Il ne sait pas qui ou pourquoi. Mais ils sont toujours là pour lui et ceux qui l’entoure.

Le jour, il travaille dans sa maison humide. Il refait les murs et les plafonds. Ils en ont besoin après toute cette vie passée à les laisser se décomposer. On voit presque à travers. Il surprenant que les rats ne lui aient pas encore rendu visite.

Il rêve de partir. De quitter cet endroit qui l’a presque vu naître. Cette maison qui sent l’humidité. Mais il a peur. Il a peur du dehors. Il a peur du bruit. Peur de se perdre.
Peur des autres. De ceux qui ne peuvent pas ou ne veulent plus faire autrement que comme ils ont appris. Comme lui finalement.
Coincé entre lui et lui, son âme s’effondre un peu plus chaque jour. Il n’a d’attente que celle de ne plus se réveiller.
S’il faut abandonner ses désirs pour être en paix et heureux à quoi bon ?
D’ailleurs, en parlant de désir, il n’en a plus.
Il n’a plus faim. Il n’a plus soif. Il n’a plus envie de sortir. Il. Il. Il
Il n’a plus envie de Il.
Qui est Il.
Armelo.
Armelo se demande.
Sans quitter la lune des yeux “Qui suis-je ?”
A chaque fois qu’il ferme les yeux “Qui suis-je ?”

Pas plus de réponse aujourd’hui qu’hier. Il pleut encore, si pas plus. Il est fatigué mais ne trouve pas le sommeil. Les tuiles sont jouées par la pluie comme il joue de sa guitare, ça sent l’humidité. Son esprit ne lui laisse aucun répit. Il ne cesse de lui répéter : “Et si, et si, et si ?”

“Et si tu commençais par me laisser dormir sombre imbécile ?”

Et si ?

A quelle hauteur puis-je voler ? Combien de fois serai-je lu. J’ai peur de savoir et surtout peur de demander.

La maison est vide et sens l’humidité. La pluie balaie les tuiles sans répit depuis que la nuit est tombée. Sur son lit, Armelo se dégourdit les doigts sur une guitare dont il dompte les cordes au rythme de ses découvertes. Il connaît bien quelques accords, mais pour le reste, il avance à l’oreille.

Sa tête est prise et jouer de cet instrument l’aide à la vider. Ou du moins la calmer pendant un…

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6 lignes – jour 100

C’est le signe d’un déséquilibre sérieux. Claire s’est presque assoupie assise sur le portail de l’enclos des chevaux. Elle est habillée d’une chemise rouge, dont le bouton du haut réplique les dernières heures de sa mère sous la potence. Elle vit plus qu’avec son père, palefrenier d’un grand marchand à Atkeer. Chaque mention du noble auprès d’elle la fait fondre sur place comme un torrent à travers la vallée.

6 lignes – jour 100

6 lignes – jour 100

C’est le signe d’un déséquilibre sérieux. Claire s’est presque assoupie assise sur le portail de l’enclos des chevaux. Elle est habillée d’une chemise rouge, dont le bouton du haut réplique les dernières heures de sa mère sous la potence. Elle vit plus qu’avec son père, palefrenier d’un grand marchand à Atkeer. Chaque mention du noble auprès d’elle la fait fondre sur place comme un torrent à…

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6 lignes – jour 99

6 lignes – jour 99

Ma petite sœur me tenait au courant des événements. Ceux qui se passaient à l’école, mais aussi à la maison et chez ses amis. Je rêvais de prendre le train, pour aller à l’école, de faire mes devoirs sous la discrétion de papa ou encore de manger du gâteau chez Rémi ou Sophie. Je l’écoutais avec attention, dans chaque aventure jusqu’à ce que ses visites se raréfient.

En même temps, elle a toute…

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6 lignes – jour 98

Tout est contour de la chose. La lumière qui ambre les peaux, l’absence de distance, la douceur de leurs doigts qui prolongent leurs pensées sans interrompre le fil de leur discussion. Le corps de l’un appelle l’autre et réciproquement, avec subtilité. Les chaussures sont mises de coté, ils privilégient la chaleur en haut du canapé sous un plaid. Partagé, car à cette altitude, il est plus judicieux de s’encorder.

6 lignes – jour 99

Ma petite sœur me tenait au courant des événements. Ceux qui se passaient à l’école, mais aussi à la maison et chez ses amis. Je rêvais de prendre le train, pour aller à l’école, de faire mes devoirs sous la discrétion de papa ou encore de manger du gâteau chez Rémi ou Sophie. Je l’écoutais avec attention, dans chaque aventure jusqu’à ce que ses visites se raréfient.

En même temps, elle a toute la vie devant elle. Pourquoi se tracasser d’un grand frère sur un lit qui comme seul signe de vie ouvre les yeux le jour par automatisme. Je ne peux même pas lui répondre. Comme elle, je finirais par me lasser. J’en suis convaincu.
Ici, il n’y a pas grand chose à faire. Parfois, je peux regarder par la fenêtre. J’y voit l’autre façade de l’hôpital. Et dans de rare occasion, je vois un autre patient qui regarde lui aussi par la fenêtre. Mais le plus souvent, je ne peux voir que le plafond blanc de la chambre. Il n’a plus été repeint depuis trois ans. Un an après que je sois arrivé. Marie avait onze ans à l’époque. Aujourd’hui, je discerne trois œuvres différentes sur le plafond, toute du même artiste.

Oscar avait perdu l’équilibre et s’était effondré dans la cuisine. Ne le voyant pas répondre à la porte quand elle sonna chez lui, l’infirmière s’occupant de lui ce jour là jeta un œil à travers la boite aux lettres. Elle venait de l’avoir au téléphone, donc il aurait été assez improbable qu’il ne soit pas à la maison. Quelle ne fut pas son horreur quand elle le vit gisant sur le carrelage en damier de la cuisine, une flaque de sang à coté de son crâne.
Mais Caroline avait le sang froid, et immédiatement, elle reprit ses esprit. Elle se rappela alors que deux ouvriers travaillaient sur un chantier dans une rue perpendiculaire. Elle couru jusque là, et sur place, leur demanda s’il avait un pied de biche pour forcer la porte.

L’ouvrier à qui elle eu affaire parla de l’histoire à son collègue, et en moins de deux minutes, elle revenait devant chez Oscar avec deux ouvriers, une massette et un pied de biche. L’un des deux ouvriers posa le pied de biche dans l’interstice entre la porte et le cadre et l’enfonça de plusieurs coup de massette. Après à peine une dizaine de secondes, la porte lâcha. A trois, l’infirmière en première, ils entrèrent dans la maison et aidèrent Oscar à se relever et se poser sur sa chaise. Il était conscient, et la blessure à son crâne était heureusement très superficielle. La flaque de sang était due aux médicaments qui fluidifient son sang. Elle l’avait emmené à l’hôpital aussitôt.

Après l’avoir rafistolé, la docteure lui avait déclaré qu’il devrait rester une semaine. Elle voulait être certaine que la blessure, bien que superficielle, ne s’empire pas.
Pendant cette semaine, il avait beaucoup tourné en rond. Il m’avait raconté cette histoire, plusieurs fois. Il finissait par “Tu sais mon petit gars, la vie c’est comme ça. Un jour tu manges une pomme, l’autre de la compote. Toi, t’as commencé par la compote.”
Et lui, la compote, il en avait ras le bol. Il pouvait plus la voir. “J’ai encore des dents bon sang !” avait-il crié avant de l’envoyer valser en l’air trois jour de suite jusqu’à ce que le personnel accepte enfin de ne plus lui en apporter et de mettre une pomme à la place.

6 lignes – jour 98

6 lignes – jour 98

Tout est contour de la chose. La lumière qui ambre les peaux, l’absence de distance, la douceur de leurs doigts qui prolongent leurs pensées sans interrompre le fil de leur discussion. Le corps de l’un appelle l’autre et réciproquement, avec subtilité. Les chaussures sont mises de coté, ils privilégient la chaleur en haut du canapé sous un plaid. Partagé, car à cette altitude, il est plus…

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Les voyages dans le temps

Revenir sur les plaines de Vasmnyir avant qu’elles ne soient inondées par le sable et les dunes. Les rivières et les fleuves, véritables veines du royaumes permettent de s’y déplacer au gré du courant, ou à contre sens. Vaemar, sa citadelle, ses alentours peuplés consciencieusement alternent entre maisonnettes et champs de culture. A cette saison, on peut y observer une couverture dorée reflétant la richesse la plus fertile de cette partie du continent.

Les nombreuses guerres ravageant les frontières ? La vie des habitants de cette partie du royaume se fait sans jamais en entendre parler. Ils se sont battu au front pour gagner leur parcelle et maintenant ne pense plus qu’à celle ci. Ne vivent que pour leur sérénité et feraient tout pour la garder intacte.

Les yeux rivés vers le lointain, le magicien voyage silencieusement à travers ses souvenirs.

“Tu vois Antonin, quand je regarde ces dunes de sable, je ne peux m’empêcher de rêver de l’ancien monde et de ses habitants,” dit Serano.

Son vieil ami au chapeau garde les yeux sur l’horizon un temps avant de lui répondre.
“Je regrette les plaines, les rivières, la couleur des champs. En revanche, l’ancien monde et ses habitants ne me manque nullement. Sans être insensible à leur sort, ce grand désert reflète à merveille la richesse de leur dévouement.”